Ottawa (Ontario) — Le Syndicat des employé-e-s de la Sécurité et de la Justice, qui représente des membres de tout le Canada, présente aujourd’hui un nouveau rapport sur les agent-e-s de libération conditionnelle intitulé La santé mentale et le bien-être des agent-e-s de libération conditionnelle fédéraux au Canada : une enquête qualitative.
Le rapport, réalisé sous la direction de Rosemary Ricciardelli, experte de la sécurité publique, révèle que des centaines d’agent-e-s de libération conditionnelle qui surveillent les délinquant-e-s présentant les risques les plus élevés du Canada subissent des niveaux de stress insoutenables et, par ricochet, des conséquences sur leur santé mentale. La réalité d’une charge de travail écrasante, ainsi que de l’exposition soutenue à de la violence physique et à des traumatismes psychologiques, a le potentiel de compromettre les résultats en matière de sécurité publique.
Le rapport révèle que de nombreux-ses agent-e-s de libération conditionnelle subissent des pressions concurrentes pour arriver à respecter certains délais irréalistes tout en effectuant des évaluations professionnelles essentielles qui sont un facteur important dans les décisions de libération conditionnelle et de réinsertion des délinquant-e-s du Canada présentant les risques les plus élevés en matière de sécurité.
Dans le cadre de l’étude de Mme Ricciardelli, les agent-e-s de libération conditionnelle fédéraux ont répété à maintes reprises leurs préoccupations quant à cette responsabilité de devoir souvent assumer la gestion de nombreux dossiers de délinquant-e-s supplémentaires lorsque leurs collègues sont en congé. Quand cela se produit, ces employé-e-s subissent une charge de travail encore plus lourde qu’à l’habitude et doivent gérer des dossiers qui sont d’une importance critique pour la sécurité publique sans être pleinement soutenus dans l’exercice de leurs fonctions.
En outre, même si le gouvernement fédéral insiste depuis peu sur l’importance d’un accès adéquat à la libération conditionnelle et aux programmes pour les délinquant-e-s autochtones, marginalisé-e-s et appartenant à d’autres groupes racialisés, le Service correctionnel du Canada n’a pas fait d’investissements en conséquence pour garantir des résultats positifs soutenus.
« Malheureusement, la pression constante d’avoir à gérer des dossiers de délinquant-e-s complexes tout en conciliant les risques de commettre une erreur en matière de sécurité publique a des répercussions majeures sur le stress professionnel et la santé mentale de ces agent-e-s de libération conditionnelle », affirme Mme Ricciardelli. « Les agent-e-s de libération conditionnelle se sentent très responsables de leurs client-e-s (c’est-à-dire les délinquant-e-s sous responsabilité fédérale) et se soucient intensément de la sécurité et du bien-être de la collectivité dans son ensemble. »
Outre la lourde charge de travail, les agent-e-s de libération conditionnelle affirment que l’exposition régulière à la violence physique et aux traumatismes indirects a une incidence sur leur santé mentale et sur leur relation avec leur famille. Dans certains cas, ces réalités peuvent entraîner des blessures de stress post-traumatique ou même un suicide.
« Les agent-e-s de libération conditionnelle avec qui nous nous sommes entretenus dans le cadre de cette étude ont déclaré avoir été témoins d’agressions au couteau dans des pénitenciers fédéraux, avoir été piégés sans arme à l’intérieur du domicile d’un-e délinquant-e et avoir dû visionner des enregistrements de crimes et de violence connexe, et ce ne sont là que quelques exemples de ce à quoi ces agent-e-s sont exposé-e-s. », souligne Mme Ricciardelli.
De plus, les agent-e-s de libération conditionnelle rapportent que lorsqu’ils cherchent à obtenir du soutien en matière de santé mentale, les spécialistes qu’ils peuvent consulter dans le cadre du Programme d’aide aux employés du SCC sont rarement efficaces, car ils n’ont pas de formation adéquate sur les traitements qui tiennent compte des traumatismes.
« Étant donné la nature du travail d’un-e agent-e de libération conditionnelle, il est essentiel que ce groupe ait accès à des fournisseur-euse-s de services de santé mentale qui ont été formé-e-s quant à la complexité et à l’intensité du travail au sein des services correctionnels », soutient David Neufeld, président national du SESJ. « Depuis plus de cinq ans, le SESJ demande à ce que le Service correctionnel du Canada améliore ses avantages sociaux en santé mentale pour les employé-e-s de la sécurité publique, dont les agent-e-s de libération conditionnelle fédéraux. Or, rien n’a changé. »
Plusieurs recommandations importantes sont formulées dans le rapport, et le SESJ demande la mise en œuvre immédiate de celles qui suivent :
- Réduire la charge de travail : Les agent-e-s de libération conditionnelle fédéraux ont parfois du mal à gérer la complexité des nombreux dossiers de délinquant-e-s, qui comprennent toute une gamme de déliquant-e-s ayant d’importants besoins particuliers et sont issu-e-s de milieux marginalisés ainsi que des délinquant-e-s ayant des antécédents de problèmes de santé mentale. Une réduction de la charge de travail permettrait de mieux outiller les agent-e-s de libération conditionnelle en mettant à leur disposition les ressources et le temps nécessaires pour répondre aux besoins de leurs clients de manière approfondie et pour assurer des résultats positifs en matière de sécurité publique.
- Régler le problème des remplacements : Les agent-e-s de libération conditionnelle signalent que lorsqu’un collègue est absent-e ou en congé, il n’y a pas de remplacement, ce qui augmente les responsabilités et le stress qui pèsent sur les autres agent-e-s et force ces derniers et ces dernières à concilier les risques potentiels à la sécurité publique. Cette politique doit être modifiée afin qu’il y ait une personne assignée aux dossiers des agent-e-s qui sont en congé et qui ne peuvent en assurer la gestion habituelle.
- Embaucher des agent-e-s de libération conditionnelle supplémentaires pour des postes à durée indéterminée : La recommandation de réduction de la charge de travail des agent-e-s de libération conditionnelle est impossible à appliquer sans l’embauche d’agent-e-s de libération conditionnelle supplémentaires. Par conséquent, le SESJ recommande fortement que le SCC embauche des agent-e-s de libération conditionnelle supplémentaires afin d’augmenter le nombre d’agent-e-s de libération conditionnelle dans chaque établissement correctionnel, bureau de libération conditionnelle et centre correctionnel communautaire. Le SESJ plaide pour que le Service correctionnel du Canada augmente le nombre d’agent-e-s de libération conditionnelle depuis 2017.
- Assurer l’accès aux traitements et aux services en santé mentale : Les agent-e-s de libération conditionnelle ont des besoins en matière de santé mentale, soit en raison d’une exposition directe à la violence physique ou aux agressions, soit en raison de traumatismes indirects. Malgré nos efforts répétés, depuis 2017, pour obtenir une meilleure protection en matière de santé mentale pour les agent-e-s de libération conditionnelle fédéraux, le Service correctionnel du Canada n’a pas encore augmenté le plafond du régime d’avantages collectifs pour soutenir l’accès à des psychologues et autres spécialistes qualifié-e-s et formé-e-s en matière des traumatismes. Cette situation doit changer. Le SESJ recommande de surcroît qu’il y ait des « consultations » annuelles obligatoires auprès d’un-e fournisseur-euse de soins en santé mentale afin de réduire les préjugés associés à l’aide en santé mentale et de s’assurer que les agent-e-s de libération conditionnelle sont en bonne santé.
- Offrir de meilleures occasions de formation aux agent-e-s de libération conditionnelle : Le SCC doit investir dans des occasions de formation régulières, de qualité et offertes par des expert-e-s. Les agent-e-s de libération conditionnelle ont exprimé un grand besoin d’avoir des occasions plus fréquentes de suivre des formations pertinentes et de disposer d’une plus grande variété de choix de formation, incluant des formations portant sur des thèmes comme l’exposition aux événements potentiellement traumatisants sur le plan psychologique, le travail auprès de certaines populations personnes détenues ou en liberté conditionnelle (p. ex. celles qui ont été condamnées pour des infractions sexuelles ou pour fraude) et la sensibilisation culturelle. Les agent-e-s de libération conditionnelle souhaitent également recevoir des formations qui leur permettent d’interagir avec d’autres professionnel-le-s des services correctionnels (y compris des agent-e-s de libération conditionnelle d’autres lieux de travail). Globalement, le fait d’offrir des formations de pointe et dynamiques aidera le SCC à répondre aux préoccupations des agent-e-s de libération conditionnelle qui ne se sentent pas adéquatement soutenu-e-s dans leur travail.
À propos du SESJ
Le SESJ représente près de 18 000 employé-e-s fédéraux de la sécurité publique et de la justice, y compris des milliers d’employé-e-s des services correctionnels qui soutiennent la réhabilitation et la réinsertion des délinquant-e-s sous responsabilité fédérale. Dans 18 ministères et services fédéraux partout au pays, les membres du SESJ travaillent activement à assurer la sûreté, la protection de la vie privée et la sécurité des Canadiens et des Canadiennes ainsi qu’un accès essentiel à l’information, à la justice et aux droits de la personne.
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