Une expérience enrichissante à vous partager
J’ai été invitée à participer, en tant qu’observatrice, à l’audition du grief de principe Cook-Chill (cuisiniers) déposé par l’AFPC qui s’est déroulée devant la Commission des Relations de Travail dans la Fonction Publique à Ottawa les 15 et 16 octobre 2014.
Le matin de l’audience, j’arrive à la salle d’audience pour rencontrer les gens de l’AFPC. L’agent aux griefs et à l’arbitrage dans ce dossier est Amarkai Laryea (avocat de métier), il est accompagné de David Orfald qui agit à titre de conseiller et sera le témoin pour l’AFPC, et Howie West qui agit aussi à titre de conseiller et qui prendra les minutes de cette audience. Il y a aussi un autre observateur, le VPR suppléant de l’Ontario monsieur Bill Bailey. L’agent de l’AFPC nous explique le déroulement de l’audition et nous conseille de prendre des notes dans le but d’apporter des points de discussion durant les pauses. Peu de temps après l’avocat de l’employeur, Sean Kelly arrive avec ses accompagnateurs.
L’arbitre fait son entrée dans la salle et donne ses instructions concernant les cellulaires et l’utilisation du matériel d’enregistrement. Il n’y a qu’un seul et strict mot d’ordre : utilisation interdite. Il y a ensuite dépôt des documents approuvés par les deux partis et nous sommes tous prêts à débuter. L’agent de l’AFPC fait un historique de la situation qui a menée au dépôt du grief et termine en posant les 3 questions sur lesquelles l’arbitre doit se pencher en priorité :
- Est-ce que le SCC a enfreint la convention collective en limitant la protection salariale à un niveau?
- Selon le Réaménagement Des Effectifs, est-ce que le poste de FOS-03 peut être considéré comme une offre d’emploi raisonnable?
- Est-ce que le SCC a enfreint la convention collective en conseillant aux employés de démissionner pour ensuite être embauchés comme FOS-03?
Par la suite l’avocat du SCC fait une courte présentation sur la centralisation des cuisines et annonce sa ligne de défense : Offre d’Emploi Raisonnable.
Le premier témoin, David Orfald, est appelé à la barre. Il fait un résumé de son expérience professionnelle, répond aux nombreuses questions de l’agent de l’AFPC et donne des précisions lorsque demandées par l’arbitre. Je ne peux qu’admirer son assurance, son calme et sa connaissance plus qu’approfondie du dossier. L’avocat de l’employeur procède ensuite au contre-interrogatoire en posant quelques questions plus au moins pertinentes, puis en revenant sur la notion d’offre d’emploi raisonnable. Le tout se déroule sur une période d’environ 90 minutes et c’est pendant ce temps que je réalise que nous sommes devant une vraie cour et que le travail effectué par nos représentants est colossal.
Après la pause repas, c’est au tour du témoin de l’employeur de se présenter à la barre. Monsieur Greg Hall expose son expérience professionnelle et répond aux diverses questions de l’avocat de l’employeur ainsi qu’à celles de l’arbitre. Il décrit brièvement les tâches et donne une approximation des salaires des différents postes de FOS. L’agent de l’AFPC procède au contre-interrogatoire en posant plusieurs questions, toutes aussi pertinentes les unes que les autres et qui, du fait même, déstabilisent le témoin. À quelques reprises, monsieur Hall essaie d’éviter de répondre, mais l’arbitre l’y oblige. L’avocat de l’employeur revient poser une question au témoin et s’en est terminé pour la journée.
Je ne savais pas trop à quoi m’attendre en me rendant à cette audition, mais je dois avouer que j’ai été agréablement surprise de la performance de l’agent de l’AFPC. Les arguments amenés étaient solides et très bien appuyés.
Le lendemain, nous avons eu droit aux plaidoiries. Les deux partis tentent de solidifier leurs arguments et, par le fait même, d’affaiblir ceux de l’adversaire en s’appuyant sur divers jugements. Le représentant de l’AFPC est le premier à faire son plaidoyer et aura donc le loisir de revenir sur certains points suite à celui de l’avocat de l’employeur. Les représentants démontrent une excellente connaissance des lois et jurisprudences et exposent leur talent d’orateur. Je crois sincèrement que c’est le moment le plus fort et aussi le plus stressant de l’audience.
Le processus se terminera donc avec la décision de l’arbitre, mais pour cela, nous devrons attendre encore quelques semaines.
Au moment d’écrire ces lignes, je me suis posée la question suivante : Quel serait le meilleur conseil que je pourrais donner aux membres de notre syndicat suite à cette expérience enrichissante que j’ai vécue? Ce serait, à mes yeux, d’inviter les membres, ainsi que nos délégués syndicaux, à bien identifier la nature d’un grief et de lier ce dernier aux bons articles de la convention collective, car le libellé peut faire toute la différence entre l’accueil ou le rejet d’un grief.
Karine Kergoat
VPR Suppléante SESG SCC Québec et
Présidente section locale 10167 La Macaza