Les présentations d’hier devant le Comité permanent de la Chambre des Communes sur la sécurité publique étaient au dire de tous un vif succès. Notamment, John Edmunds, président national du SESG, John Leeman, ancien détenu et diplômé du programme des prisons agricoles, et Bill Flanagan, doyen de la faculté de Droit à l’Université Queens, ont tous frappé des coups de circuit dans un effort concerté visant à convaincre les membres du comité de retourner devant le Parlement afin de revoir la décision à courte vue de fermer les prisons agricoles.
John Leeman, ancien détenu et diplômé du programme des prisons agricoles, a présenté un récit très personnel de ses expériences dans des prisons agricoles, soulignant qu’il était venu afin de parler au nom des détenus, d’aujourd’hui et d’hier, qui ne voulaient voir fermer les prisons agricoles.
Le principal argument avancé par le gouvernement pour fermer les prisons agricoles est qu’il compte offrir d’autres possibilités de formation à l’exercice d’un métier, de manière à ce qu’ils puissent poursuivre leur formation pour obtenir leur accès à des métiers spécifiques. Sauf que le gouvernement tarde à présenter les données financières appuyant ce choix, ni ses plans concrets à cet égard : c’est de la pensée magique. M. Leeman a signalé que les établissements de détention offraient par le passé des formations dans plusieurs métiers, mais que les gouvernements successifs ont érodé ces programmes, de telle sorte qu’il ne reste plus que le programme des prisons agricoles.
La présentation de Bill Flanagan a souligné la méthode canadienne établie à l’égard des personnes détenues, axée sur les mesures correctionnelles et la réhabilitation, pas uniquement sur les mesures punitives. Les données qu’il a présentées montrent que le taux de criminalité était en constante régression depuis quelques années, mais qu’avec l’approche actuelle du gouvernement privilégiant «ordre public» et la tendance aux peines de prison obligatoires, il est prévu que la population carcérale augmentera de 10 % au cours des prochaines années. De plus, le budget de SCC devrait augmenter de l’ordre de 27 % au cours des deux prochaines années pour atteindre plus de 3 milliards de dollars, avec une hausse de 25 % dans le nombre d’employés; le ministère estime que le programme n’est pas rentable puisque peu de détenus décrochent un emploi dans le secteur de l’agriculture ou de l’horticulture au moment de leur libération. M. Flanagan n’a pas été convaincu par le raisonnement du gouvernement, expliquant qu’après avoir étudié la question et l’approche préconisée par le gouvernement à l’égard des prisons agricoles, estimant que cette initiative n’était pas fondée sur des considérations monétaires mais plutôt inspirée d’une certaine idéologie et avait peu à voir avec la volonté de faire des économies. Il est d’avis qu’à la lumière de l’augmentation des budgets de SCC par le gouvernement, celui-ci démontre qu’il est prêt à gaspiller davantage d’argent dans les prisons mais n’a pas la volonté d’offrir un programme d’inspiration plus humanitaire pour permettre aux détenus d’acquérir les compétences nécessaires afin de mieux les préparer à s’adapter à la vie en société une fois libérés.
La présentation de John Edmunds a fait valoir que le SESG demande depuis plusieurs mois au gouvernement les données financières fondant sa décision et qu’il reçoit toujours une fin de non recevoir. Le gouvernement semble vouloir se cacher derrière sa classification de tels documents dans la catégorie de documents du « Cabinet » et donc ne pouvant être communiqués au public. Il reste trop de questions sans réponse dans ce dossier : dans quelles activités le gouvernement va-t-il dépenser les fonds qu’il consacre au Service correctionnel? Quel est le coût réel des programmes agricoles offerts dans les établissements de détention? Combien cela coûtera-t-il à SCC après la fermeture des fermes agricoles de s’approvisionner en produits alimentaires auprès de fournisseurs externes? Que se passerait-il s’il se produisait une situation d’urgence, qu’un établissement doit imposer l’isolement cellulaire des détenus et que les fournisseurs externes ne sont pas autorisés à pénétrer à l’intérieur des murs pour livrer les denrées alimentaires? M. Edmunds a demandé aux membres du comité de se lever et de poser ces questions auxquelles le SESG n’arrivent pas à obtenir des réponses.
Il est évident que ces présentations ont commencé à faire comprendre aux membres du comité permanent l’importance de ces fermes tant pour les employés, les détenus que la population en général. La réunion s’est terminée avec le dépôt d’un avis de convocation à une prochaine réunion du comité permanent.
Tout compte fait, une journée très fructueuse pour l’avenir des prisons agricoles !